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Décor architectural et tracé urbain en Afrique nord 1830-1950
C'est assez dire que la Tunisie constitue la matière essentielle de l'étude. La visite de Napoléon III à Alger marque un tournant dans les interventions aux colonies; désormais, le pouvoir colonial, recherchaant un certain consensus, détruira moins de médinas. Le goût de l'exotisme, la question du "logement indigène" se mêlent à la nouvelle politique pour qu'une architecture "néo-mauresque" puisse éclore dans le Maghreb des années 1900-1930. A Alger en 1900, Jonnart, le préfet donne des directives pour la réalisation de bâtiments officiels de "caractère arabe", tandis que Giauchain l'architecte cherche l'inspiration dans les prestigieux monuments musulmans du Caire ou de l'Inde; la grande poste d'Alger témoigne de cette période. En Tunisie, deux architectes Guy et Valensi déplacent la question en s'intéressant aux caractères locaux de l'architecture, à l'art de disposer la céramique, à l'art de construire. Au Maroc après la guerre, les frères Tharaud, Galloti, Prost, Laprade, sous l'oeil bienveillant de Lyautey, louent le charme des villes impériales. La sensibilité des agencements de la nature et des maisons, le pittoresque de la ville deviennent les éléments de composition d'une architecture "à la manière arabe".
Ainsi la première partie de l'ouvrage retrace l'évolution de l'architecture "arabisante" qui de Giauchain à Laprade, à ouvert son champ de référence de la monumentalité au dépouillement, à l'image des grands mouvements architecturaux qui passaient de l'éclectisme au mouvement moderne. Commentant ensuite les "grands tracés", François Béguin et son équipe situent le lieu du conflit entre tissus urbains européens et maghrébins. Et de la confrontation brutale à la mise en place d'une théorie de la séparation, d'Alger à Casablanca, de Rabat à Tunis, les auteurs soulignent à grands traits les étapes de la politique coloniale, qui passe de la destruction à la momification des villes anciennes. Mais en n'évoquant que par allusions l'architecture du Maghreb, en ne la plaçant pas dans son contexte urbain, ne risque-t-on pas de limiter cet héritage historique à des "valeurs d'ambiances" à des "éléments de décor", au pittoresque, tout en réduisant l'architecture coloniale à quelques cartes postales ?